La vie clandestine

Monica Sabolo

Gallimard

  • Conseillé par
    21 décembre 2022

    Monica Sabolo entreprend d'écrire un livre sur Action directe, le mouvement révolutionnaire qui fit de nombreuses victimes dans les années 80.
    Elle épluche tout ce qu'elle trouve sur tous les supports possibles, mais l'entreprise s'avère ardue.
    Elle s'égare souvent, imagine ce qui n'est pas écrit, rencontre des personnes liées à ce mouvement.
    Mais surtout, elle dévie souvent sur sa propre vie avec laquelle elle a encore bien des comptes à régler.
    Qu'est-ce que les souvenirs ?
    Se souvient -t-on des faits réels ou des souvenirs que l'on en a ?
    La dissociation permet-elle de vivre en enfouissant des douleurs émotionnelles, en se coupant du réel ?
    Entre le comportement des accusés d'Action Directe et ses propres réactions, elle fait des parallèles.
    Comme Nathalie Menegon et Joëlle Aubron, tristement célèbres, Monica Sabolo s'est construit un mur:
    elle, c'est pour rester à l'abri de secrets d'enfance trop lourds à porter.
    « Chacun est victime et coupable »
    « Pour ma part j'ai l'impression d'avoir trouvé ce que je cherche, sans le savoir,
    depuis toujours. Un homme qui puisse s'asseoir devant moi, et admettre l'existence de la souffrance qu'il a causée. »
    Après un début de lecture un peu difficile, ne sachant où cette histoire me menait, j'ai été captivée par la démarche de Monica Sabolo.
    Avec intelligence et neutralité, elle s'infiltre dans la vie de ces révolutionnaires.
    Avec une infinie pudeur, elle dévoile ses propres blessures.
    Comme eux, il lui semble avoir toujours mené une vie clandestine.
    C'est un livre puissant, courageux, libérateur.


  • Conseillé par
    7 novembre 2022

    famille, terrorisme

    De l’auteure, j’avais beaucoup aimé Crans-Montana, et beaucoup moins ses autres romans. Je commençais donc son dernier ouvrage avec un certain à priori. Et je l’ai refermé en étant passionnément convaincue par cette lecture.

    Pas tant par ses recherches sur Action Directe que par ce que l’auteure dit d’elle-même.

    Car même si le récit peut sembler patiner par moment (seule la lecture des vieux magazines lui apporte des informations), le parallèle fait avec ses recherches familiales est poignant.

    Elle se rend vite compte que le problème est l’enquêtrice elle-même. J’ai aimé son appel à sa mémoire pour tenter de faire la lumière sur les zones d’ombres de son enfance.

    J’ai souri à chaque fois qu’une référence au lac était faite, comme dans un de ses précédents romans Summer, dans lequel le lac en bout de propriété était omniprésent.

    J’ai aimé Hellyette Bess, petite main de l’ombre mais toujours dans la lutte.

    J’ai toutefois été étonnée que, voulant écrire un livre sur les filles d’Action Directe, l’auteure ne retranscrive jamais aucun propos des anciens membres qu’elle rencontre. Et je me suis demandée si le but premier du livre n’avait pas fait place, malgré l’auteure, à un objectif plus personnel.

    J’ai été étonnée de découvrir le père de l’auteure, personnage trouble qui avait rapporté pleins de souvenirs de ses voyages en Amérique latine, transformant l’appartement familial en musée.

    J’ai aimé le propos de l’auteure : nous pouvons nous approcher de la noire blessure d’enfance, sans pour autant vouloir faire toute la lumière dessus. Accepter de vivre avec est déjà assez difficile.

    J’ai souligné plein de passages qui m’ont parlé.

    Quelques citations :

    "Le passé est là, mais personne ne peut l’atteindre, il se balance dans un filet invisible."

    Dans ses livres, Jean-Marc Rouillan raconte les hold-up, appelés « opérations de financement » ou « expropriations prolétariennes ».

    "La question de nos vies à tous, la condition de notre humanité. Celle de notre capacité à reconnaître, sinon comprendre, les ressentis de l’autre, voire d’envisager cet autre comme une part inconnue de nous-même."

    "Le regret traîne l’ombre du désaveu, le reniement de ce qu’on fut, d’une jeunesse, d’un idéal."

    "Ce qui a eu lieu a eu lieu. Telle est la vérité avec laquelle nous devons apprendre à vivre."

    "Il n’y a pas de réponse, pas d’apaisement. Mais Régis Schleicher les regarde, chacun d’entre eux, bien en face."

    "Un homme qui puisse s’asseoir devant moi, et admettre l’existence de la souffrance qu’il a causé. Des êtres qui acceptent de se livrer et combler le vide dans mon coeur."

    L’image que je retiendrai :

    celle des plantes vertes mourantes dans la librairie politique d’Hellyette Bess.

    https://alexmotamots.fr/la-vie-clandestine-monica-sabolo/


  • Conseillé par (Libraire)
    5 octobre 2022

    Sombre et lumineux : magistral

    Monica Sabolo nous raconte le marécage de sa vie qui prend l’eau comme son appartement inondé en permanence. Il faut alors qu’elle trouve un sujet facile, loin d’elle -même et de ses préoccupations maussades. Un éclair, une émission de radio et elle trouve son sujet qui tient en deux mots : « Action directe », groupe terroriste d’extrême gauche qui assassinera notamment Georges Besse, PDG de Renault le 17 novembre 1986. « J’allais écrire un truc facile et spectaculaire, rien n’était plus éloigné que cette histoire là ». Un hasard total, du moins c’est ce que croit l’autrice mais choisit on un sujet vraiment par hasard? Très vite en épluchant les journaux de l’époque, en retrouvant un enquêteur, en surfant sur le net, en fouillant des documents photographiques, jusqu’à la névrose, une évidence nouvelle s’impose à l'auteure: « Je ne savais pas encore que les années Action directe étaient faites de tout ce qui me constitue: le silence, le secret et l’écho de la violence ».

    Commence alors un double récit, en parallèle, celui de l’enquête sur le mouvement d’extrême gauche, celui de sa vie depuis les mystères de sa naissance à Milan, deux récits a priori sans aucun rapport, deux récits qui finissent pourtant par s’enchâsser l’un dans l’autre, deux vies clandestines dans l’ombre du secret, du mystère. D’un côté Nathalie Ménigon, Joëlle Aubron et leurs comparses révolutionnaires, de l’autre Monica Sabolo et sa famille. Des deux côtés une récurrence: la violence.
    Ces deux voix qui se rejoignent sur des questionnements identiques. Que faire de la violence? Qui sont les êtres qui nous entourent? Qu’est ce que le pardon?
    Un livre bouleversant où la résilience tente, grâce à la puissance de la littérature, de trouver sa place.

    Eric


  • Conseillé par (Libraire)
    31 août 2022

    L'autrice explore le passé. Le sien d'abord, dans un milieu bourgeois, à l'ombre d'un père absent aux activités suspectes. Mais aussi celui du groupe Action Directe qui sème la terreur en France à l'époque où Monica Sabolo grandit. Elle plonge dans l'histoire des membres du groupe, veut apprendre à les connaître, décortique ce qui les anime.
    M. Sabolo entraîne le lecteur à sa suite dans ce pan de l'histoire française qui trouve de nombreux échos dans la vie de l'autrice. Une découverte fascinante !


  • Conseillé par
    29 août 2022

    Devant l’aquarium …

    Parallèlement à son autobiographie, l’auteur plonge le lecteur dans son enquête menée sur le groupe Action Directe de 1979 à 1986, son propre passé ressurgissant à l’évocation de ces faits divers extrémistes.
    A l’âge de 27 ans, Monica Sabolo découvre ses propres vies clandestines en apprenant sa véritable filiation et les affaires mystérieuses de son père Yves S.

    Sa quête de vérité sur les militants d’extrême gauche s’avérant compliquée par le peu de documents et de témoignages fiables, elle traque et s’infiltre dans les mémoires de Nathalie Ménigon, Joëlle Aubron, Hellyette Bess, Claude et les autres…
    Les thèmes de la mémoire et du Pardon sont ici essentiels, jaillissant dans le texte au risque de brûler les ailes….
    Ce roman est fait avec les moyens du bord, ce qui rend l’écriture parfois décousue et le style hétéroclite ; mais la combinaison enquête/histoire personnelle est maîtrisée et fonctionne.

    « Je voulais être à la hauteur des miens »
    « Je n’aime pas quand papa vient me voir, le matin »
    « Je pensais te demander pardon, un jour, là-haut, quand nous serions morts »


  • Conseillé par
    20 août 2022

    Un livre touchant

    Alors qu'elle entreprend une véritable enquête sur les membres du groupe terroriste d'extrême gauche Action Directe, Monica SABOLO se retrouve confrontée à sa propre histoire. Monica SABOLO nous livre alors un récit intime sur sa vie, son enfance, ses failles, ses blessures.
    A travers les deux histoires, sont explorées en parallèle, les notions du pardon, de la rédemption et de la résilience.


  • 3 août 2022

    Un texte percutant sur la complexité et l'ambivalence des hommes

    Alors qu'elle cherche un sujet de roman qui l'éloigne d'elle-même, Monica Sabolo se plonge dans les archives de l'émission "Affaires sensibles". Celle consacrée au groupe Action Directe l'interpelle, ce groupe armé révolutionnaire qui commit de nombreux braquages et attentats en France dans les années 80, visant les symboles de l'état et du grand patronnat.
    Tandis qu'elle progresse dans son enquête, qu'elle s'immerge dans l'époque, elle prend conscience que le sujet, en définitive, la ramène à elle. Commence alors un double récit: celui d'Action Directe et en miroir, son histoire familiale qu'elle esquive depuis des années. L'enquête concernant Action Directe devient alors comme une béquille pour affronter son passé. Chaque histoire se questionnant l'une l'autre autour des thèmes qui hantent l'autrice: secret, silence, violence, trahison et possibilité d'un pardon.
    Monica Sabolo nous livre ici son récit le plus intime et le plus sincère. Un texte percutant sur la complexité et l'ambivalence des hommes.